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Les assignations à résidence inquiètent

Parmi 270 cas de personnes interdites de mouvement, plusieurs contestent la légitimité des décisions prises à leur encontre.

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Au petit matin, 30 gendarmes armés frappent à la porte et investissent l’appartement de Karim. Deux jours après les attentats, ce jeune bagagiste de l’aéroport de Roissy voit son domicile fouillé de fond en comble. Absolument rien de suspect n’est trouvé chez lui. Son casier judiciaire est vierge et aucune fiche de renseignement n’a jamais été établie à son encontre. Mais, depuis le 15 novembre, Karim doit pointer, quatre fois par jour, au commissariat de sa commune du Val-d’Oise. Il est assigné à résidence.

Comme lui, depuis la promulgation de l’état d’urgence, près de 270 personnes ont l’obligation de résider dans des lieux « déterminés par le ministère de l’Intérieur », qui d’ailleurs ne sont pas nécessairement leur domicile.

En temps normal, l’assignation à résidence, qui peut s’accompagner du port d’un bracelet électronique, concerne des personnes poursuivies ou condamnées dans le cadre d’une procédure pénale, ou des étrangers en situation irrégulière, sous le coup d’une obligation de quitter le territoire. Dans le cadre de l’état d’urgence, toute personne, pour laquelle « il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics », peut être concernée par cette mesure sur simple décision préfectorale.

Seulement, voilà, deux semaines après le carnage, comme pour Karim, plusieurs personnes se retrouvent emprisonnées chez elles sans que rien ne puisse leur être reproché. La loi prévoit que, dans ce cas, on puisse déposer un recours auprès des tribunaux administratifs (TA). Mardi, deux ont été examinés par le TA de Paris. L’un d’entre eux concerne le président d’une association musulmane à qui l’on reproche un soutien logistique présumé à des individus condamnés pour terrorisme. L’homme collecte des habits et de petites sommes d’argent pour aider des personnes proches de détenus. Son avocat évoque « la précipitation » des forces de police.

Ce genre de cas ne concerne pas la seule région parisienne. À Montpellier (Hérault), l’association Aïcha, qui s’occupe d’un lieu de culte musulman dans le quartier Garosud, a dénoncé, mercredi, l’assignation à résidence pour trois mois de son imam Mohamed Khattabi. L’organisation, qui a fermement condamné les attentas de Paris et du Stade de France, évoque une décision « sans motif clair » à l’encontre d’un imam « au discours rassembleur et vecteur de positivité ». À Toulouse (Haute-Garonne), dans le quartier des Izards, où plusieurs personnes sont assignées à résidence, des responsables associatifs s’inquiètent du « climat que va générer la mise en application de l’état d’urgence ».

La Ligue des droits de l’homme, pour sa part, pointe le fait que les motifs prévus par la loi, qui peuvent être invoqués pour justifier l’assignation à résidence d’un individu, « dépassent de beaucoup la prévention et la répression d’actes de terrorisme ». Et de mettre en garde sur le fait que ce type de disposition « permet à tout gouvernement de s’en prendre au mouvement social dans son ensemble ».

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Tag(s) : #Décryptages, #Attentats en France
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